Lettre du 2 Mars 1921 de Djafer Seidamet, Président et Délégué du Parlement Tatare de Crimée addressée au Maréchal Franchet d’Esperey, Conseil Suprrême de Guerre Letter of March 2nd 1921, from Djafer Seidamet, President and Delegate of the Tartar Parlement of Crimea to The Marshal Franchet Esperey, Supreme Council of War

Transcription

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Délégation du Parlement Tatare de Crimée

2 Mars 1921 

À Monsieur le Maréchal Franchet d’Esperey

Conseil Suprême de la Guerre

Monsieur le Maréchal, 

Votre attitude plus qu'aimable envers mes concitoyens donc j'ai pu me persuader pendant votre séjour à Constantinople, et les conversations que j'ai eues avec vous, de même que ma certitude que les idéals et les aspirations de mes concitoyens d'accord avec la justice et l’humanité ne sont nullement opposées, mais bien au contraire correspondent aux intérêts de la République Française, me donnent la hardiesse de vous adresser l’exposé des moyens et de sauver mon pays des Bolcheviks.

Je prends la liberté de vous parler au nom de tout le peuple Tatare de Crimée sur les motifs suivants :

1-) Des les premiers jours de la Révolution russe de février 1917, j'ai du sur mandat et par le choix de mes concitoyens, assurer les postes les plus responsables de la vie publique en Crimée, et en qualité de ministre de la guerre, responsable devant le Parlement Tartars de Crimée. Vers la fin de 1917, j’ai organisé l’armée de Crimée, j’ai été à la tête de l’État-Major de Crimée et en cette qualité, j’ai fait la guerre aux bolcheviks; dans mon armée, il y avait beaucoup d’officiers russe. 

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2-) Par un mandat en date du 10 février 1919, le Parlement de Crimée m’a accordé les pleins pouvoirs, dont je vous envoie ci-inclus une copie et m’a chargé d’être son représentant responsable et le défenseur de ses intérêts auprès des gouvernements de l’Entente.

On ne saurait douter de la volonté de la Crimée de se délivrer du joug barbare des bolcheviks. La religion le patriotisme, les intérêts économiques des tartares de Crimée, les mettent à l'opposé des théories et du régime bolchevik. Depuis 3 ans, ils n'ont cessé et cesseront pas de lutter contre les bolcheviks, avant d’en être libérés.

Depuis la défaite et la fuite de Wangler et l'occupation de la péninsule par les bolcheviks, les Tatares de Crimée mènent une lutte acharnée mais inégale contre ces oppresseurs. Les bolcheviks, de leur côté, ne reculent devant aucuns moyens pour briser la résistance des Tatares.

D'après les nouvelles que j'ai reçues récemment, ils ont fusillé plusieurs membres du Parlement Tatare, comme par exemple Saïd Ghali, Karabibéroff, Mourtazayeff, et Saïd Mouslimoff. Les atrocités commises par les bolcheviks en Crimée, les plaintes et objurgations de mes concitoyens et enfin à tous les idéals nationaux et historiques de Tatares de Crimée sont des motifs suffisants pour souhaiter la délivrance aussi rapprochée que possible du régime bolcheviste en Crimée et pour y travailler. 

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Le Parlement de Crimée, par son décret du 18 décembre 1917 a proclamé la péninsule de Crimée une république démocratique. Depuis il a pour tout le peuple tatare de Crimée lutté et fait des efforts pour restaurer et préserver la république indépendante.

Mais la Crimée indépendante doit jouer un rôle fort apportant dans le renversement du pouvoir bolcheviste. Sous ce rapport, je suis persuadé que le rôle principal devra être joué par l’Ukraine, pour laquelle la Crimée debarrassée des bolcheviks, pourra servir de base pour l’action guerrière contre la Moscovie.

Enfin la République démocratique et indépendante de la Crimée nuirais grandement à la politique orientale des commissaires moscovites. Il ne faut pas oublier que dans la Russie même il y a une trentaine de millions de Turco-tatares, pour qui la délivrance des Tatares de Crimée du joug bolcheviste, serait la première impulsion donnée auTurkestan, Aux habitants des bords de la Volga, de l’Oural et de la Kirjhisie, pour les faire soulever contre l’armée rouge qui combat contre l’Ukraine et la Crimée.

Le bolchevisme, comme c’est connu, n’a pu s’implanter en Russie que grâce aux intririgues allemandes, mais il continue à donner depuis 3 ans et demi et les bolcheviks qui d’après leurs proper aveu ne comptent pas un million de partisans,  tiennent sous leurs pieds cent millions d’habitants. Cela peut naturellement s’expliquer par le fait que les Russes manquent d’i- 

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 nitiative,, ne connaissent pas l’esprit de liberté, et que d’un côté, l’esprit de servitude, c’est trop commun je chez ce peuple et de l’autre l’esprit d’anarchisme. Grâce à cette situation, le people russe par-lui-même ne pourra jamais rejeté le pouvoir bolchevik. Nous croyons fermement que la Russie ne pourrait se servir de l’anarchie bolcheviste que par les diverses nationalités qui étaient avant la guerre sujettes de la Russie.

Deniline, Koltchak, Youdenitch, Wrangel, et d’autres généraux nous ont versé des flots de sang et on dépenser des centaines de millions des Alliés, mais non pu atteindre leurs buts, parce qu’aucun de ses généraux n’était  supporté par les ‘’petites nationalités’’. Elles ne les soutenaient pas, parce qu’aucun de ces généraux ne pouvait jouir de sympathies de ces nationalités. Même à présent toute la lutte intérieure et les nombreux soulèvements soutenus surtout par les nationalités de l’ancienne Russie.

Le général Wrangel qui commandait plus de 100.000 hommes et qui avait une ligne de défensive inexpugnable n’a pu garder l’isthme de Pérékop, parce que les soldats russes de Wrangel ne se battaient pas et que dans les jours les plus critiques de la lutte 25.000 officiers de Wrangel se promenaient librement dans les villes de Crimée, loin de l’isthme de Pérékop, tandis que les Tatares de Crimée ne se battaient pas pour Wrangel parce qu’ils voyaient en lui seulement un ennemi de l’indépendance des Tartares et un oppresseur de la Crimée. 

Dans la lutte contre le bolchevisme et dans la délivrance de l’Europe orientale de l’anarchie grande russienne, comme je l’ai dit ci-dessus, la force principale des ukrainiens don’t la

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 grande majorité consiste en petits agriculteurs, et qui par suite de circonstances économiques ne peuvent se faire aux principes communistes. Le mouvement libérateur ukrainien qui a souffert dans son développement bien des insuccès à cause des fautes commises par les derniers temps, a pris une direction plus distincte et les paysans ukrainiens commencent enfin à comprendre quelle économie le communisme leur apporterait. C'est pourquoi le mouvement national, robuste et sain de l’Ukraine se fortifie et les intellectuels ukrainiens non plus de peine à soulever les grandes masses paysannes pour lutter contre la Moscovie. Mais dans cette lutte pour l’Ukraine les premiers auxiliaires doivent êtreles Tatares de Crimée. C’est ce qui eu lieu en 1917, alors que l’Ukraine et la Crimée étaient liées  par des liens les plus étroits dans la lutte contre les bolcheviks russes. Alors l’Ukraine par sa première universal avait reconnu l’indépendance de la Crimée.

Pour les cosaques du Kouban, voisins de la Crimée, la délivrance de celle-ci des dernières forces bolchevistes aurait une grande importance stratégique dans leur lutte prochaine en faveur de leur indépendance contre les bolcheviks. 

Les intérêts politiques, économiques et stratégiques de la Pologne dépendent aussi de la libération de la Crimée et de l’Ukraine des bolcheviks. 

D’après ces constatations et en me basant en partie sur ma reconnaissance des tendances de la politique du gouvernement polonais actuel, j’ai lieu de croire que le mouvement Criméen contre les bolcheviks sera soutenu par les Polonais qui sont unis 

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par une amitié traditionnelle avec le Tartare de Crimée. LesTatares de Crimée qui depuis plus de cent ans vivent dans l’espérance de se débarrasser du joug russe et qui depuis trois ans souffrent des cruautés et des dévastations inouïes des mains des bolcheviks, des Allemands, de Denikine et de Wrangel, sont animés à présent d’un patriotisme ardent et du désir unanime de combattre les bolcheviks, afin de restaurer leur existence indépendante.

Maintenant dans la péninsule il y a une population tatare autochtones de 

700.000 hommes dont on pourrais faire facilement une armée de 50.000 hommes. Pour commencer l’organisation d'une telle armée, il faudrait protéger du côté de la mer, l’isthme de Pérékop et quelques parties de la presqu'île, au moins pendant 2 à 3 mois. Pour organiser cette armée il faut encore un certain cadre d’officiers et d’artillerie;  ce secours pourrait être fourni par le gouvernement français est ce secours ne resterait pas sans récompense de la part de la Crimée. Si un tel secours n'était directement possible, le gouvernement français pourrait aider à l'organisation

de détachement d’émigrés Criméens en Turquie et en Roumanie, avec des cadres de volontaires polonais. Pour commencer à libérer la Crimée des bolcheviks, à présent, on trouve les conditions suivantes : 

  • il y a quelques milliers d’anciens soldats de Crimée à Constantinople et des prisonniers tartares en Allemagne et en Pologne. Avec l’autorisation et le support matériel du gouvernement français, il serait facile d’organiser, avec ces soldats, une force de plusieurs milliers d’hommes. À la première entrée 

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de ses détachements en Crimée, on pourrait en quelques jours tenir une

force assez importante de tartare du pays, car même à présent, on y trouve

des organisations clandestines sous la forme d’un comité central du parti 

tatare du bureau exécutif du Parlement de Crimée avec un comité guerrier.

Mais l’armement et le personnel du commandement de l’armée devraient être

préparés hors de la Crimée et comme je l’ai déjà fait remarquer, il faudrait au

moment de l’entrée des petites forces armées et pendant l’organisation des

forces locales en Crimée, faire garder l’isthme de Pérékop et les côtes de la

presqu’île par quelques vaisseaux de guerre. 

Le développement d’un grand soulèvement en Ukraine et l’obligation

pour les bolcheviks de soutenir la lutte sur d’a front aideraient

naturellement au succès du mouvement tatare même sans la participation

d’une flotte.

Les frais de la France pour un tel secours pour affranchir la Crimée

devraient être assurés par des produits du pays : en pétrole, en fruits, en 

tabac, etc. Comme représentant du peuple de Crimée, j’ai le droit légitime et

morale de parler sur cette question au nom de mon peuple et le besoin est

d’entrer en pourparlers avec le gouvernement polonais dans le but de

répondre pour les dettes de la Crimée.

Si grâce a votre bienveillance, Monsieur le Maréchal, le Conseil Suprême

de la guerre accorde son attention à ma proposition, s’il admet la possibilité 

de consentir à aider la Crimée à chasser les bolcheviks pour son à

dépendance, je me sentirais

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 Heureux de présenter au Conseil Suprême de la Guerre tous les détails

pratiques pour la réalisation possible du plan d’action proposée ici.

Veuillez agréer, Monsieur le Maréchal, au nom de mes concitoyens,

l’expression de notre profond respect et de notre haute considération.

Président et Délégué du Parlement Tatare de Crimée. 

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